Le contrat de capitalisation en France
Parole d’expert : questions à olivier roumélian
« À côté du contrat d'assurance-vie le contrat de capitalisation a toute sa place. Il faut simplement réussir à l'utiliser de manière optimisée, intelligente, en respectant les souhaits et les intérêts de chacune des parties. »
Version textuelle de l'interview :
Q1. Pouvez-vous nous parler du contrat de capitalisation en France ?
En France le contrat de capitalisation est régi par le code des assurances, de la même manière qu'un contrat d'assurance-vie, mais il diffère parce qu'il n'a pas d'assuré et pas de bénéficiaire(s). Pendant de longues années le contrat présentait un avantage : un intérêt fiscal, et subissait une contrainte. La pratique a su bénéficier de l'avantage fiscal tout en surmontant la contrainte technique qui lui était imposée. La particularité c'est qu’aujourd’hui, au moment où on se parle, l'avantage fiscal a disparu et la contrainte également a disparu. La question que l'on peut se poser c'est : est-ce que le contrat de capitalisation a toujours un intérêt ? La réponse est oui, parce que le contrat fonctionne sur la technique, comme son nom l'indique, de la capitalisation ; ce qui signifie que les gains générés dans le contrat s'accumulent et ils ne sont ni appréhendés par le souscripteur ni taxés aussi longtemps qu'il n'y a pas de rachat par le souscripteur.
Q2. Existe-t-il des particularités liées à la souscription ? (ex. notion de démembrement)
En droit français la propriété est constituée de l'usufruit et de la nue-propriété. On peut démembrer toute chose, qui soit une chose matérielle ou immatérielle. On peut démembrer la propriété d'un immeuble comme on peut démembrer la propriété d'un portefeuille titres par exemple. Le démembrement de propriété est une technique qui est utilisée pour la transmission de patrimoine. C'est certainement en France ce qui marche le mieux avec un contrat d'assurance-vie. C'est complexe d'utiliser le démembrement de propriété dans un contrat d'assurance-vie à la souscription, en revanche ce qui fonctionne bien c'est le démembrement de propriété de la clause bénéficiaire. Un contrat de capitalisation n'a pas de clause bénéficiaire puisqu'il n'y a pas d'assuré. En revanche l'intérêt est de démembrer la propriété du contrat de capitalisation, soit ab initio1, soit en employant en réemploi des fonds démembrés, résultant de l'exécution d'une clause bénéficiaire démembrée d'un contrat d'assurance-vie. On se retrouve avec un souscripteur en usufruit et un ou plusieurs souscripteurs en nue-propriété, qui deviendront propriétaires à terme lorsqu'il y aura extinction de l'usufruit. Cette technique était utilisée par le passé pour résoudre une contrainte fiscale qui n'existe plus aujourd'hui. Malgré tout ça reste une technique qui doit être utilisée parce qu'elle présente un intérêt majeur pour la planification successorale.
Q3. Ce type de contrat est parfois souscrit par des personnes morales. Pouvez-vous nous expliquer ?
Il faut bien distinguer deux catégories de personnes morales : les sociétés civiles patrimoniales et les sociétés industrielles et commerciales soumises à l’IS . Dans le premier cas des sociétés civiles on utilise cette technique comme un instrument de transmission de patrimoine. C'est la société civile qui va souscrire le contrat de capitalisation en pleine propriété. La société elle a des associés, en général ses associés sont des associés qui détiennent des droits en usufruit et en nue-propriété. Au décès de l'usufruitier la pleine propriété des parts de la société civile est reconstituée au niveau des nues-propriétaires. La particularité c'est qu'il faut bien gérer les droits de l'usufruitier, ses droits et ses obligations, notamment la perception des revenus et la taxation des revenus qui sont perçus. Pour cela on recommande de conclure une convention entre les associés de la société civile, ça c'est pour le volet patrimonial. Pour ce qui concerne les sociétés industrielles et commerciales, la souscription d'un contrat de capitalisation est du placement de la trésorerie.
Comme je le disais précédemment le contrat repose sur la technique de la capitalisation qui fait qu'il n'y a pas d'appréhension de revenus pour le souscripteur, qu'il soit une personne physique ou une personne morale. Mais l'administration fiscale elle, considère selon un régime bien spécifique, que la taxation doit se faire de manière actuarielle, c'est-à-dire étalée sur la durée du contrat sous réserve que quelques conditions sont respectées.
En conclusion que l'on parle d'une société civile, que l'on parle d'une société industrielle et commerciale soumise à l’IS 2, ou d'une personne physique. Que l'on parle de transmission de patrimoine, que l'on parle de démembrement de propriété, que l'on parle de capitalisation, on se rend compte qu’à côté du contrat d'assurance-vie le contrat de capitalisation a toute sa place. Il faut simplement réussir à l'utiliser de manière optimisée, intelligente, en respectant les souhaits et les intérêts de chacune des parties.
1 Ab initio : locution latine qui signifie depuis le début, au commencement.
2 IS : impôt sur les sociétés.
Le contrat de capitalisation, tout comme le contrat d'assurance-vie, est régi par le code des assurances. L'intérêt du contrat de capitalisation pour personnes morales réside notamment dans le fait que les gains ne sont pas taxés tant qu'il n'y a pas de rachats. Il est également possible d'utiliser le démembrement pour un contrat de capitalisation qui présente un intérêt majeur pour la planification successorale.